Un journal indien par Corinne Caratti, une invitation à partager un voyage merveilleux au pays de la lumière, où rien n'est jamais vraiment ce que l'on croit, et pourtant tout semble bien réel.

Chapitre II

Gokarna



(...)
Mercredi 31 janvier. Jour de festival. Dans la matinée, quatre résidents de la pension et moi avons été invités à déjeuner par les parents de Nimmu dans la ville voisine de Kumpta à l'occasion d'un festival très renommé. L’invitation nous est parvenue aussi soudaine que ferme et définitive, il n’était absolument pas question de la refuser. Et vu le traitement de VIP qui nous avait été réservé, il aurait été vraiment dommage de rater pareille aubaine. Une Ambassador et son chauffeur sont venus nous prendre devant le portail de la guesthouse pour nous conduire jusqu'à Kumpta chez nos hôtes qui nous ont accueillis et reçus avec beaucoup d'égards, de bienveillance et de curiosité. Le déjeuner était composé d'un délicieux thali, cuisiné par la maîtresse de maison et servi sur une feuille de bananier fraîchement coupée.
Au moment de partir, nos hôtes s'excusent de ne pas pouvoir assister au festival en raison de leur âge avancé et de leur santé fragile. Nous les remercions longuement pour leur accueil pendant qu'eux nous remercient d'avoir été leurs invités, chacun, chacune joignant les mains devant son coeur en échangeant de nombreux namastés avant de nous quitter.
Je n'avais aucune idée de ce qu'était un festival hindou, Nimmu avait juste évoqué une longue procession d'un endroit de la ville à un autre en expliquant qu'il était salvateur d'y participer, que nos âmes s'en trouveraient purifiées...
Célébration, dévotion, spiritualité, frénésie, hystérie... Comment décrire l'émotion et l’exaltation de la foule en délire ? Subjuguée, transportée et ébranlée en même temps que troublée, apeurée et presque effrayée par la clameur, le rythme et l’inexorable marche de l'imposant cortège humain, j'en ai bientôt le souffle coupé... Très vite, nous parvenons à grimper et à nous entasser sur un balcon au premier étage d'un restaurant, à l'abri de la vague de corps qui déferle tout autour d'un énorme char transportant l'effigie d’un Dieu habillé de robes safran et couvert de
guirlandes de fleurs. Des prêtres sont assis à ses côtés, d'autres marchent à côté du char tiré par des hommes torse nu. Tout autour, des musiciens frappent leurs tambours, des pèlerins chantent à tue-tête et dansent...
Plus le cortège avance, plus on se rend compte qu'il est suivi d'une foule immense... Une énergie incroyable occupe chaque centimètre carré d'espace. J'en suis tout étourdie... Nous rentrons tard dans la nuit, magnétisés par l’expérience que nous venons de vivre... Incapables de dormir, nous nous asseyons dans le jardin, où quelques irréductibles tirent encore sur leurs shiloms, avides d'entendre le récit de notre journée.
Difficile de raconter une expérience pour laquelle on ne possède pas encore de mots appropriés...
Est-ce par amour ou par crainte qu’une multitude de personnes se
rassemble avec cette unique ferveur au fond des yeux ?


 (...)



















Aucun commentaire: